Comment récupérer sa sérénité
après un licenciement discutable ? Comment tourner une page douloureuse ? Comment
se sortir d’une expérience relationnelle traumatisante ? Comment se libérer
d’une rancune ?
La réponse est une épreuve
en soi : on se libère de rancunes par le pardon. Le pardon est un processus de réconciliation.
Il peut servir aussi au bien-être physique, mental et émotif. Celui qui est
capable de le pratiquer augmente même l'estime de soi.
Familles déchirées « de
générations en générations », fratries brouillées « à mort »,
couples écorchés à vif, amitiés brisées « pour toujours », équipes
« irrémédiablement » divisées, collègues ennemis « jurés »
…Ces accidentés sociaux sont à la fois, les auteurs et les victimes des leurs
propres débordements. Leur refus, ignorances, intransigeances, sont autant de
formes d’incompétences émotionnelles qui les conduisent à trahir un devoir de solidarité
morale et matérielle envers leurs communautés.
Le plus souvent, ces accidentés
sociaux occasionnent et subissent simultanément une rupture brutale et tragique
de la relation. Toute une palette de séquelles s’installe tant que perdure
cette situation inachevée : tourments, souffrances, rancunes,
ressentiments, projections, colères, etc. Chaque partie semble bloquée, plongée
dans une solitude existentielle, empêtrée dans le processus qui l’a conduite à
la rupture du contact.
Il existe deux méthodes pour traverser
ces épreuves et en limiter les dégâts :
1. Celle
qui consiste à attendre que le temps finisse par en atténuer les effets sur
votre ego.
2. Celle
-beaucoup plus rapide et infiniment plus riche en enseignements- qui vous
conduit à réparer en vous-même les dégâts causés par des compétences
personnelles insuffisamment développées.
C’est cette deuxième approche que nous choisissons de vous
présenter ci-après. Nous vous proposerons de prendre en main votre propre
rétablissement et de sortir par le haut de toutes sortes d’accidents sociaux.
Parce qu’elle s’intéresse aux conditions qui favorisent le
bon déroulement d’une expérience, l’approche Gestalt propose une réponse
constructive à cette question. Nous vous renvoyons au chapitre 3 de l’ouvrage
« Manager
d’élite » pour plus de détails sur cette approche.
Pour une rémission
1. Nommer le traumatisme en s’appuyant sur les émotions qu’il suscite
(roue de Plutchik).
Tristesse,
colère, peur, résignation, aversion, outrage… Parler de sa propre expérience.
Attention à ne pas confondre des faits objectivement observables et des
interprétations personnelles.
Exemple 1 : (colère)
Je suis en colère car il m’a menti en
ne respectant pas sa promesse.
Exemple
2 : (outrage)
Je suis outragé par leur manque de respect.
2.
Nommer
et détailler l’offense
Confiance, irrespect,
trahison, manipulation, tromperie, mensonge, abus de pouvoir, contrainte,
menace, insultes, humiliation, honte ?...
Qu’est-ce qui
me rend si sensible à cette offense ?
Exemple 1 : (trahison)
Je n’accepte pas que l’on trahisse ma confiance.
Je me sens manipulée, il est hors de question de passer l’éponge si rien ne
change.
Exemple
2 : (insolence)
Je ne supporte pas une telle insolence de la
part de mes enfants adultes.
3.
Identifier
vos vulnérabilités
À quels dangers
cette offense m’expose-t-elle ?
Il est important
d’être honnête avec soi-même car cette étape fait apparaître une vulnérabilité
personnelle identifiée ou à identifier.
Une autre façon
de poser cette question d’étape 3 est la suivante : « de quelle vulnérabilité
est-ce que je me préserve en légitimant mon intransigeance ? ».
Exemple 1 :
(crédulité)
J’ai tendance (besoin ?) à croire tout ce
que l’on me dit. Je sais que je suis plutôt naïve, vulnérable à la
manipulation, à la tricherie, etc.
Exemple 2 : (pouvoir)
J’ai peur de perdre mon autorité de chef de
famille et d’exposer des fragilités dont j’ai honte.
4.
Réévaluer
votre responsabilité
Votre
responsabilité dans le blocage actuel se cache derrière votre condamnation des
autres. Si vous êtes déconcerté à cause d’une fragilité de votre système de
défense, faut-il pour autant que les autres en soient tenus pour les seuls
responsables ?
Exemple 1 :
En réalité, je suis facile à duper. Je
prends conscience que je lui en veux de
m’avoir menti parce qu’il n’a pas tenu
compte de ma fragilité. (C’est peut-être ridicule mais je dois reconnaitre que
c’est ma réalité).
Ma
responsabilité = la candeur avec laquelle j’accorde ma confiance.
Exemple 2 : Mon statut social c’est ma sécurité. Je
t’en veux de m’avoir mis en insécurité en ne t’y soumettant pas.
Ma
responsabilité = orgueil ou conventions personnelles non partagées concernant
le rôle dominant du chef de famille.
5. Pardonner
Il
faut se pardonner beaucoup à soi-même pour s’habituer à pardonner beaucoup à
autrui. (Anatole France)
Si votre implication dans les 4 étapes
précédentes venait confirmer la pénible évidence de votre responsabilité dans l’accident
social qui vous encombre, alors votre bonne foi – à elle seule- suffira à vous réparer
et à tourner la page. Le travail d’introspection qui vous a conduit à ce
constat vous honore. Vous méritez la clémence envers vous-même. Apprenez à vous
pardonner.
Le
pardon ne permet pas d’effacer le passé d’une relation, mais il permet à celle-ci
d’avoir un avenir.
Par contre, lorsque
cette analyse renforce la conviction que les responsabilités sont partagées, alors
chaque protagoniste devra prendre en considération le fait que s’il a parfois été
offensé, il a peut-être – à d’autres moment- été offenseur. Cette
reconnaissance permettra de conduire les protagonistes vers l’indispensable
chemin de l’empathie. Le témoignage de l’empathie de l’offenseur est capital.
Il conditionne la résolution et la clôture à l’amiable de l’accident social. Rappelons
que – dans cette situation - l’empathie s’installe lorsque l’offenseur s’efforce
de communiquer son expérience d’une réponse émotionnelle face à l’émotion exprimée
par la personne offensée.
Exemple 1 :
Je reconnais que ma candeur peut parfois attirer
le mensonge. Désormais, sache que je te
demanderai, ici ou là, de me fournir des gages de ta loyauté.
Exemple 2 : Je veux que tu reconnaisses à quel point j’ai
pu me sentir outragé par ton insoumission…même si je suis d’accord pour que
nous réexaminions les droits et devoirs de chacun au sein de la famille.
Et qui
pardonne au crime en devient complice. (Voltaire)
Que faire en l’absence
d’empathie ? Vouloir pardonner les offenses d’une personne enfermée dans
son égoïsme vous compromettrait immanquablement. Si votre « offenseur » ne vous témoigne pas d’empathie,
alors il vous faudra peut-être reconsidérer le bien-fondé de cette relation. En
effet, pourquoi poursuivre une relation potentiellement toxique ? Que
peut-on attendre d'un individu dépourvu de sensibilité qui ne se soucie que de
son propre intérêt, même au détriment d'autrui ? La mise à l’écart
temporaire de cet offenseur devient alors une nécessité : celle de vous
préserver.
Le cycle de
l’expérience du pardon.